Conférence plénière – 5 – Michael Lucken

Anime et classicisme : une mise en perspective historique

Les œuvres du studio Ghibli sont volontiers qualifiées de « classiques de l’animation » (anime no koten ou kurashikku-anime). Une première acception, la plus courante, considère comme classique ce qui constitue un modèle d’équilibre entre réalisme et idéalisme. Une autre, plus savante, désigne les œuvres qui revendiquent l’héritage gréco-romain. De quoi parle-t-on lorsqu’on évoque le classicisme de l’animation japonaise ?

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la référence à l’antiquité gréco-romaine est très présente dans l’univers des anime et, plus généralement, dans certaines formes de la culture visuelle contemporaine. Mon hypothèse est que ces références ne doivent pas être comprises uniquement comme des métaphores de l’Europe et des États-Unis, mais comme l’expression d’un long processus d’appropriation des valeurs et des formes de l’Antiquité.

À l’instar de l’Allemagne du 19ème siècle, le Japon a construit depuis l’ère Meiji un Griechenmythos qui lui est propre, une relation privilégiée à la Grèce dont les manifestations les plus frappantes s’observent dans les domaines de l’architecture, de la sculpture, de la philosophie ou encore de la littérature. Replacées dans cette perspective, les grandes œuvres de l’animation japonaise depuis les années 1980 prennent un sens nouveau. Elles rappellent l’importance de toutes les filiations non européennes de la culture grecque à laquelle elles confèrent une universalité plus large et féconde que jamais.

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